MONACO – La campagne pour l’élection présidentielle chez notre voisin français est percluse de remous concernant la moralité de certains candidats, frappés de plein fouet par des affaires politico-judiciaires. La plus symbolique d’entre elles, le Pénéloppe-Gate et les soupçons d’emploi fictif autour de François Fillon viennent de traverser la frontière, et agite le microcosme aux environs de la place de la Visitation.
Des soupçons toujours plus grands
En effet, l’administration monégasque, organisme public au service d’une volonté politique qu’elle soit gouvernementale ou municipale, est sujette à nombre de procédures et de contraintes qui font le sel des contestations de la part de la population. Travail opaque, fonctionnaires en vacances, promotions et embauche au copinage, et non au mérite, les légendes urbaines sont nombreuses. Et la crise des emplois fictifs de notre voisin français n’a fait qu’exacerber un peu plus cette défiance envers les fonctionnaires, certes loués sur le fond, de par la qualité des services rendus, mais vilipendés sur la forme plus que de nécessaire.
Quand la réalité dépasse le fictif…
Le cas d’Antoine n’est pas anodin. Suite aux remous du Pénélope-Gate, certains autochtones se sont mis martel en tête : rien ne ressemble plus à une administration qu’une autre administration, et pourquoi les Monégasques paieraient-ils des impôts pour finir dans les poches d’un emploi fictif ?
C’est toute cette inquiétude qui s’est abattue sur Antoine, commis dans un des plus importants services gouvernementaux de la Principauté. Son chef de section a reçu la semaine dernière une pétition paraphée par une cinquantaine de Monégasques et résidents. Ce document dénonce avec virulence le fait qu’Antoine, personnalité connue de la Condamine, et très grand amateur de socca, se présente à qui veut l’entendre comme fonctionnaire, alors que les usagers de son service ne l’ont jamais vu. Il n’en fallait pas plus pour provoquer l’ire de la population. Et faire grincer un peu plus les dents en haut du Rocher.
Une réalité fictivement méconnue
Après une brève enquête, nous avons retrouvé Antoine, qui a accepté de nous recevoir dans son bureau. Car il existe bel et bien, au fin fond d’un couloir, juste après la machine à café, non loin des placards à fournitures. Il nous a parlé de son travail « prépondérant pour la bonne marche de l’administration qui l’emploie ». En effet, il a la « responsabilité du classement informatique et de l’archivage ». Ses horaires sont sous haute surveillance, et il badge « scrupuleusement tous les jours à la bonne heure avant d’aller prendre un café au bar juste à côté ». Et afin de rassurer ses détracteurs, il nous a déclaré « ne manquer un seul jour de travail pour rien au monde. La connexion internet est parfaite pour regarder les bandes-annonces et les démos de jeu vidéo ».
Enfin, Antoine a conclu cette triste histoire avec l’humour : « vous savez, on ne m’a jamais vu dans la même pièce que Batman. Et pourtant, je ne prétendrais jamais être ce fameux justicier masqué… »