Depuis l’arrêt de la ligne X4, Saint-Roman vit en vase clos. Officiellement, la CAM évoque une « réévaluation de l’offre pour une meilleure synergie interquartiers ». En réalité, le quartier semble désormais coupé du monde, comme une colonie oubliée après un cataclysme.
Une pétition géante… ignorée
C’est une mobilisation historique : plus de 137 000 signatures de Monégasques et de résidents ont été recueillies en moins de 48 heures pour demander le retour immédiat de la ligne X4, suspendue brutalement il y a quelques jours. Parmi les signataires : des habitants, des commerçants, deux chiens semi-résidents, et un yacht autonome sous IA.
Mais, malgré l’ampleur du mouvement, les autorités restent silencieuses, évoquant seulement une « réflexion en cours sur l’avenir du réseau ». Une phrase qui, à Saint-Roman, sonne comme une condamnation.
L’autonomie, après l’isolation
À l’entrée du boulevard d’Italie, une barrière improvisée faite de caddies renversés et de poubelles enchaînées circonscrit la « Zone Autonome de Saint-Roman ». On y entre après vérification d’un laissez-passer manuscrit, tamponné à l’encre de sardine.
À l’intérieur, une organisation parallèle s’est installée. Le troc de sardines, de gel douche et de câbles HDMI fait office de monnaie, les paraboles artisanales sont construites avec des cintres, et le Wi-Fi a été remplacé par un système de signaux lumineux à base de lampes torches et de miroirs de salle de bain. Les colis sont livrés à la fronde depuis les hauteurs du Larvotto. Chaque soir, un ancien professeur de yoga devenu chef de quartier réunit les résidents pour un point d’info improvisé, suivi d’un concert de casseroles, censé capter les ondes radio italiennes.
Éducation alternative et gouvernance locale
L’éducation est désormais assurée par Gollum, seul résident non monégasque du 7e étage de la tour Elsa, faciès douteux, dentition anarchique et chihuahua menaçant. Il est aussi le dernier à posséder une encyclopédie papier encore lisible.
Le quartier s’est doté d’un maire élu à main levée et d’un drapeau confectionné à partir d’un rideau de douche. Un hymne est en discussion, en franglais patoisant, afin d’être compris par les 17 nationalités restantes.
Un retour à la normale improbable
« C’est comme un rêve post-apocalyptique, sauf qu’on paie toujours le CHC », souffle Mireille, 78 ans, en tricotant des chaussettes à trois doigts « pour anticiper les mutations qui vont viendre ».
La CAM se veut rassurante : un projet de navette autonome serait à l’étude. Mais aucune échéance n’est donnée. Le budget aurait été absorbé par la climatisation du centre commercial de Fontvieille.
La pétition continue de grossir, sans réponse. Désormais, certains résidents envisagent le rattachement administratif à Roquebrune : « Au moins, eux, ils ont encore un bus. »